Obligations linguistiques entreprises

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La loi sur l’emploi des langues en matière administrative comprend plusieurs obligations linguistiques qui doivent être respectées par les entreprises. D’autres normes peuvent également leur imposer des règles linguistiques.

Obligations linguistiques pour les entreprises dans la législation en matière administrative

Ces règles linguistiques s’appliquent aux documents 'officiels', l'emploi des langues dans l'entreprise et aux documents destinés au personnel.

En outre, les entreprises doivent dans certaines situations, également tenir compte des obligations linguistiques qui sont en principe d’application aux services publics. Il s’agit de situations dans lesquelles les entreprises privées sont en quelque sorte “engagées” dans l’exécution d’un marché public.

Dans quels domaines les entreprises doivent-elles appliquer la législation linguistique?

En principe, les entreprises bénéficient du principe de la liberté linguistique repris à l'article 30 de la Constitution. Cependant, la législation linguistique les oblige à rédiger certains documents dans la langue de la région. Cette obligation s'applique aux documents rédigés par les entreprises et les sociétés prescrits par une loi ou réglementation.

En vertu de toutes sortes de législations, les entreprises sont tenues de rédiger et de conserver nombre de documents, par exemple le registre du personnel afin d’assurer le respect de certaines dispositions sociales au profit des travailleurs. Pour se doter de la personnalité juridique, une société doit déposer au greffe divers documents, tels que les statuts et procurations, et les faire publier au Moniteur belge. L’interaction croissante entre les autorités et les entreprises a incité le législateur à réglementer l’emploi des langues pour ces documents officiels; des documents dans d'autres langues perturberaient le fonctionnement des services publics.

Par conséquent, la langue de la région où est établi le siège d'exploitation de l'entreprise doit être utilisée. Concrètement, cela signifie que les entreprises établies en Flandre, en ce compris les communes à facilités, doivent utiliser le néerlandais. Si l'entreprise est établie dans la région de langue française, les documents officiels doivent être en français.

Cependant, ce prescrit ne s'applique pas à la correspondance avec les clients ou fournisseurs, ni à la publicité ou à la langue utilisée dans une transaction commerciale. Après tout, il est important que l'acheteur et le vendeur se mettent d’accord en toute connaissance de cause.

Toutefois, des factures ou bons de commande qui sont légalement obligatoires doivent être rédigés dans la langue de la région.

Vous trouverez plus d’informations sur les sites suivants des autorités fédérales :

La notion «relations sociales», qui se rapporte aux contacts verbaux et écrits entre employeur et travailleur, est étroitement liée à une relation de travail. Bien qu'une relation de travail se situe principalement dans la sphère privée à laquelle s’applique le principe de la liberté linguistique, le législateur a réglé la communication entre employeurs et travailleurs dans la loi.

Ici, c’est surtout la protection des travailleurs qui fut primordiale: le législateur voulait s'assurer que toutes les instructions des employeurs aux travailleurs soient communiquées dans une langue qu'ils comprennent. La langue utilisée par les travailleurs entre eux sur le lieu de travail n'est pas réglée par ces normes.

Les documents destinés au personnel doivent donc être rédigés dans la langue de la région dans laquelle est établi le siège d’exploitation. Il est évident que si l’entreprise a plusieurs sièges d’exploitation, il s’agit du siège auquel le travailleur est attaché.

  • Contrat de travail

Sur la base de l’article 52 de la loi sur l’emploi des langues en matière administrative, les entreprises établies dans une commune périphérique rédigent les contrats de travail en néerlandais. Sur la base de l'article 5 du décret du 19 juillet 1973, la même obligation s’applique aux communes linguistiquement homogènes de la Région flamande, ainsi qu’en cas de rupture de la relation de travail. Si ce prescrit linguistique n'est pas correctement appliqué, la résiliation du contrat peut être contestée devant les tribunaux. Il peut également être important pour le calcul des délais de préavis ou des indemnités de licenciement.

    Néanmoins, la Cour de Justice de l’Union européenne a jugé que l'usage exclusif du néerlandais et la peine de nullité pour les contrats transfrontaliers rédigés dans une autre langue, tel qu'imposé par l'article 5 du décret du 19 juillet 1973, violaient le principe de la libre circulation des personnes, repris à l'article 45 TFUE.

    Plus d'informations:
    Voir arrêt C-202/11 de la Cour de Justice de l’Union européenne du 16 avril 2013

    Suite à cet arrêt, le législateur décrétal flamand a modifié l'article 5 du décret du 19 juillet 1973. En insérant un nouveau paragraphe dans cet article, il est désormais possible d’ajouter aux contrats de travail individuels une version juridiquement valable dans une langue compréhensible pour chaque partie concernée. Un tel ajout n'est possible que pour une langue de l'UE ou pour une langue officielle de l'un des États membres de l'UE ou de l'EEE (Espace économique européen) et uniquement dans les cas suivants:

    1. Le travailleur a son domicile dans un autre état membre de l’UE ou l’EEE;
    2. Le travailleur a son domicile en Belgique et fait usage de son droit à la libre circulation des travailleurs ou de la liberté d’établissement;
    3. Le travailleur relève de la libre circulation des travailleurs en vertu d’une convention internationale ou supranationale.

    Il peut uniquement être dérogé aux dispositions du décret linguistique flamand en faveur de la réglementation européenne, qui est hiérarchiquement supérieure, s’il s’agit d’une situation transfrontalière, c’est-à-dire qu’une des parties ou tout autre élément essentiel du contrat doit être étranger, rendant ainsi le droit européen applicable. En d’autres termes, l'arrêt ne peut être transposé à des questions purement internes. 

    • Offres d'emploi

    La Cour constitutionnelle estime que les offres d’emploi ne rentrent pas dans la notion ‘relations sociales entre les employeurs et les travailleurs’ parce qu'il n'y a pas de relation de travail à ce moment-là. Une vacance d’emploi ne va pas au-delà de la notification unilatérale de la possibilité de nouer une relation de travail.

    • Entretiens d'embauche

      Les entretiens d'embauche, en revanche, relèvent de la notion de ‘relations sociales’. Bien que la Cour estime qu’il n'y ait pas de lien juridique formel au moment de ces entretiens, on peut parler d’une relation entre un employeur potentiel et une personne dont la candidature a été prise en compte. Au cours de cette conversation, les éléments essentiels de la relation de travail seront précisés.

      Les règles qui s'appliquent aux fonctionnaires, tant statutaires que contractuels, diffèrent considérablement de celles du secteur privé. En effet, l’emploi des langues dans les services publics est soumis à des règles plus strictes que dans les entreprises. En général, on peut dire que la langue employée dans les relations sociales dans les services publics est régie par la réglementation relative à la langue interne.

      Situations spécifiques

      Dans un certain nombre de situations spécifiques, une entreprise doit tenir compte des règles linguistiques (plus strictes) qui s'appliquent aux services publics. Pensons aux personnes morales créées par les pouvoirs publics et soumises à l’autorité des pouvoirs publics. Cela peut également s'appliquer aux personnes morales de droit privé ou de droit public auxquelles le gouvernement fait appel pour l’exécution d’une tâche/une mission/un ensemble de tâches/un service.

      Par exemple, lorsqu’elle exécute cette mission, l'entreprise doit respecter les règles relatives aux avis et communications au public qui sont d’application au service public mandataire. Il va de soi que ces obligations linguistiques ne s'appliquent pas aux autres activités de l'entreprise.



      Les concessionnaires d’un service public doivent respecter la loi sur l’emploi des langues en matière administrative, tout comme les entreprises privées qui exécutent une mission au nom et pour le compte du gouvernement.

      Dans le premier cas, il s'agit d'un concessionnaire (une personne physique, une entreprise ou une société) qui est autorisé par le gouvernement à exécuter un (des) certain (s) marché (s) public (s), et par cela à fournir un service. Le concessionnaire a le droit exclusif d'exécuter ce service. Pensons à la piscine communale ou la cafétéria du complexe sportif ou au centre culturel communal, qui sont exploités par une personne privée ou une entreprise. Dans le second cas, une entreprise privée exécute (certains aspects d’) une mission qui, en principe, appartient à un service public. C'est le cas, par exemple, pour certains aspects des services fournis par un syndicat (organisme de paiement dans le cadre du chômage), une caisse d'assurance-maladie (l’assurance-maladie flamande) ou un hôpital privé (services d'urgence).

      Loi sur l'emploi des langues en matière administrative (LCLA), article 1, §1, 2°

      Lorsqu'un service public fait appel à des entreprises privées ou des experts pour l’exécution de ses tâches, ces acteurs privés doivent rencontrer les obligations linguistiques auxquelles sont soumis ces services publics. Cependant, comme ces collaborateurs privés ne sont pas sous l'autorité d'un pouvoir public, ils ne relèvent pas de la loi sur l’emploi des langues en matière administrative pour l'organisation de leurs services et le statut juridique de leur personnel. En d'autres termes, ces entreprises doivent respecter les obligations linguistiques pour les tâches et les services qu'elles exécutent au lieu de ou pour le compte du service public. Le pouvoir adjudicateur reste cependant responsable en dernier ressort de l'application effective et correcte des prescrits.

      Loi sur l'emploi des langues en matière administrative (LCLA), article 50

      Cette règle s’applique également aux structures de coopération créées par les services fédéraux (pour la gestion et la sécurisation de l'information) comme Smals (ICT for society). Smals soutient et seconde les organismes/services publics dans leur gestion de l'information, afin qu’ils puissent offrir une prestation de services efficace et effective à leurs utilisateurs. Il ne s’agit pas de services publics, ni de concessionnaires de services publics, mais d’organisations affiliées aux services publics fédéraux par le biais d'un marché. Par conséquent, leur personnel ne fait pas partie de l'administration publique dont il est mis à disposition. Cependant, ce personnel doit rencontrer les exigences de l'art. 50 de la loi sur l’emploi des langues en matière administrative dans le traitement des dossiers, la communication externe avec des tiers et la communication interne avec les membres du personnel de l'administration concernée.

      Les entreprises publiques sont chargées de missions de services publics, mais elles opèrent dans un environnement compétitif. Les entreprises publiques autonomes telles que De Lijn ou la SNCB, sont également tenues d’appliquer la loi sur l’emploi des langues en matière administrative.

      Loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques


      Emploi de principe de la langue de la région

      L’obligation d’utiliser la langue de la région pour les documents officiels est reprise à

      • l’article 52 de la loi sur l’emploi des langues en matière administrative:“§ 1. Pour les actes et documents imposés par la loi et les règlements et pour ceux qui sont destinés à leur personnel, les entreprises industrielles, commerciales ou financières font usage de la langue de la région où est ou sont établis leur siège ou leurs différents sièges d'exploitation.

        Dans Bruxelles-Capitale, ces documents destinés au personnel d'expression française sont rédigés en français et ceux destinés au personnel d'expression néerlandaise en néerlandais.”

      • l'article 5, §1 du décret du 19 juillet 1973 de la Communauté flamande réglant l'emploi des langues en matière de relations sociales entre employeurs et travailleurs, ainsi qu'en matière d'actes et de documents d'entreprise prescrits par la loi et les règlements.
        “La langue à utiliser pour les relations sociales entre employeurs et travailleurs, ainsi que pour les actes et documents d’entreprise prescrits par la loi et les règlements et pour tous les documents destinés à leur personnel, est le néerlandais.”
      • l'article 2 du décret du 30 juin 1982 de la Communauté française relatif  à la protection de la liberté de l'emploi des langues et de l'usage de la langue française en matière de relations sociales entre les employeurs et leur personnel ainsi que d'actes et documents des entreprises imposés par la loi et les règlements.
        “La langue à utiliser pour les relations sociales entre employeurs et travailleurs ainsi que pour les actes et documents des entreprises prescrits par la loi et les règlements est le français, sans préjudice de l'usage complémentaire de la langue choisie par les parties."

      Obligations linguistiques dans d’autres normes

      Les entreprises doivent également prendre en compte les exigences linguistiques reprises dans d'autres normes. La langue utilisée dans les modes d’emploi et pour l'étiquetage par exemple est réglementée par le droit de la consommation.

      Pour plus d'informations à ce sujet, voir la rubrique Obligations linguistiques dans d'autres normes.